« Le drame du pianiste, c’est que son action est exclusivement verticale. C’est le défi permanent de notre art. »
-Leon Fleisher
Au piano, tout son émis est aussitôt voué à l’extinction. Le pianiste doit composer avec cette réalité en tentant de donner l’illusion de l’horizontalité, de la connexion entre les notes, quand la musique interprétée est mélodique.
Le technicien connaît ce paradoxe et doit tenter d’aider le musicien dans cette tâche.
On peut favoriser l’impression de legato par divers moyens rassemblés sous la rubrique « harmonisation »: Les points de terminaison des cordes doivent être bien nets pour que la vibration soit transmise efficacement à la table d’harmonie, le marteau doit frapper les trois cordes (ou les deux) en même temps et de la bonne manière, le son doit être bien cohérent d’une note à l’autre, pour encourager les « bonnes harmoniques » et un bon soutien des sons. C’est cette capacité des sons à maintenir une belle progression dans le temps après l’émission qui permet de « faire chanter » le piano autant que possible.
C’est d’ailleurs une façon de juger la qualité d’un instrument: jouer des notes longues dans tous les registres, écouter l’évolution du son. On préfère un son qui reste le plus longtemps et qui diminue selon une belle courbe régulière, sans baisse soudaine à aucun moment.
Un piano bien accordé aura d’ailleurs déjà une longueur d’avance: les vibrations bien synchronisées vont se renforcer mutuellement pour que le son dure longtemps, alors que des vibrations désordonnées vont se combattre et s’annuler.
En vérité, cependant, les choses musicales sont beaucoup du domaine subjectif. « Faire chanter » le piano tient au moins autant à la qualité de la « pensée » du musicien au piano qu’aux aspects techniques ci-haut mentionnés.
Écoutez cette pianiste mythique: Malgré le vieil enregistrement, sa pensée musicale et son legato extraordinaire nous parviennent inaltérés.